Le recrutement d’un salarié n’est pas une entreprise fiable à 100 %. Un entretien d’embauche est un moment où se concentrent un grand nombre de biais. Il s’avère que chaque recruteur « bricole » à sa façon la préparation de cette phase pourtant importante Mais on retrouve quelques grandes constantes. Explications...
Le recruteur recherche souvent des candidats sur la base de critères qui ne sont pas toujours explicites. Et cela peut le conduire à recruter le mauvais candidat. Généralement, il tente de structurer le processus de recrutement. Il rédige une fiche de poste qui définit des critères attendus. Et il évaluera les candidats sur la base de ces différents critères.
Le nombre de recrutements qui échouent est très difficile à quantifier parce qu'il faudrait mesurer ce qu'est le succès, donc mesurer la qualité du travail réalisé par le salarié recruté après un entretien de recrutement réussi.
Des études* ont été conduites sur ce sujet. Elles ont consisté à mesurer la performance des salariés dans leur travail après le recrutement et à comparer celle-ci avec les évaluations qui ont été réalisées au moment du recrutement.
Si le recruteur possédait une boule de cristal, la performance réalisée une fois en poste serait 100 % identique à celle évaluée par les recruteurs. Quand on questionne un recruteur moyennement expérimenté, il vous répond qu’il pense pouvoir annoncer entre 75 et 80 % de réussite. Les plus expérimentés, des seniors des RH par exemple, annoncent qu’ils sont capables de réussir leur recrutement à 80 voire 90 %.
La réalité est beaucoup beaucoup moins flatteuse... Quand on regarde les études réalisées sur ce sujet. Le taux de réussite se révèle être à moins de 55 %. Ce qui signifie qu’un processus de recrutement permet à un recruteur d’être à peine meilleur que s’il tirait chaque candidat à pile ou face.
Pourquoi ? Parce qu’il existe des biais dans les décisions de recrutement qui faussent la mise. Il est donc important de les connaître pour essayer de les réduire si on est le recruteur… et d’en jouer si l’on est le candidat.
Par exemple, nous savons que la tendance naturelle des recruteurs est fortement marquée par les stéréotypes. Si le poste est habituellement masculin, le recruteur va avoir tendance à recruter un homme. C’est le plus évident. Si le recruteur a effectué ses études dans une école particulière, il va avoir tendance à recruter la personne qui sort de cette même école. Il a aussi tendance recruter des gens qui viennent du même milieu social que sien. De la même couleur de peau. Ces stéréotypes sont, bien sûr, le plus souvent inconscients.
L'humeur du recruteur
De plus, des d'erreurs aléatoires sont produites dans une même entreprise pour un même poste, toujours sur la base de mêmes critères. Le tout peut aboutir à des choix complètement différents. Ainsi, les études montrent qu’un même recruteur, avec le même candidat, peut changer d'opinion suivant qu’il recrute un lundi matin et qu'il pleut ou un vendredi après-midi et qu'il fait beau. De la même façon, des mesures ont montré que l’humeur du recruteur, son état de fatigue, altèrent sa façon de juger. Ce constat vaut aussi pour des juges lorsqu’ils rendent leur verdict. Mais cela est un autre sujet, même si les situations sont comparables dans certains points.
Vous devez-vous dire, quel est donc l’intérêt de cet article ? Le premier, il doit vous aider à vous déculpabiliser. Vous savez maintenant que peu d’entreprises ont mis en place un processus fiable de recrutement. Et que si vous n’êtes pas retenu, c’est que la pièce est probablement retombée du mauvais côté.
Le second intérêt réside dans cette faiblesse du recruteur dont vous, candidat, allez faire une force. Nous venons de voir, que pendant les deux heures que dure un entretien, il difficile pour des recruteurs de prendre les bonnes décisions. En revanche, un candidat bien préparé et qui a bien travaillé sa présentation et les réponses aux questions peut, dans le même laps de temps, donner le meilleur de lui-même et jouer des biais qui représentent des handicaps pour le recruteur.
* Pour en savoir plus :
Un livre : Noise. Pourquoi nous faisons des erreurs de jugement et comment les éviter, par Daniel Kahneman – prix Nobel d’économie, Olivier Sibony, Cass R. Sunstein chez Odile Jacob
Une émission de radio : https://www.franceculture.fr/emissions/superfail/alexandre-benalla-le-fail-du-recrutement Nota : le sujet de cette émission n'est pas l'affaire Benalla (même si s'avère que Benalla a bénéficié d'erreurs de recrutement), mais bien le sujet de ce post avec comme invité Olivier Sibony, un des auteurs du livre Noise.
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